[Lutte contre le trafic de stupéfiants] Réaction de Gabriel Serville, président de la Collectivité Territoriale de Guyane, à la note du procureur de la République

La Guyane doit recevoir les moyens de protéger sa jeunesse et son territoire.

 

« La note du procureur de la République relative à la poursuite en matière de stupéfiants révèle que faute de moyens humains et matériels les autorités judiciaires en Guyane doivent choisir entre les missions régaliennes qui leur sont confiées.

 

Face aux incompréhensions que suscitent une telle décision et afin de mieux cerner les raisons de cette mesure, j’ai rapidement pris l’attache du procureur de la République : en raison d’un effectif insuffisant, le choix a été porté sur l’objectif de saisir les matières pour priver les réseaux de la manne financière que constitue le trafic de stupéfiants plutôt que de réprimer.

 

Nous ne pouvons nous satisfaire d’une telle décision qui ne constitue en rien une solution.

 

En dépit de l’objectif assigné, ces dispositions entraîneront un recul dans la lutte contre les stupéfiants sur le territoire car rappelons que l’enjeu n’est pas uniquement d’empêcher l’arrivée de stupéfiants dans l’Hexagone mais bien de protéger l’ensemble du territoire national dont la Guyane fait partie.

 

L’enjeu est également de protéger notre jeunesse, de l’extirper des mains des réseaux de trafic et de lui offrir des perspectives afin qu’elle puisse prendre toute sa part dans le développement de la Guyane. Or la procédure de simplifiée constitue un appel d’air en direction de tous les trafiquants du monde qui, face au peu de moyens du système judiciaire en Guyane, mobiliseront davantage de « mules » pour maintenir le niveau de leurs trafics et de leurs bénéfices. Un système qui engendrera à terme l’embolie de l’Aéroport Cayenne – Félix Eboué, principal lieu de contrôle et d’arrestation des « mules » et dont les effectifs, déjà insuffisants, seront d’autant plus en peine pour réaliser l’ensemble des contrôles.

 

Pour finir, l’enjeu est aussi d’assurer un environnement plus sécurisé à l’ensemble nos compatriotes dans un contexte de recrudescence de la criminalité sur le territoire.

 

Aussi, nous lançons un cri d’alarme et demandons solennellement au président de la République Emmanuel Macron et à son Gouvernement, en particulier la Première ministre, le ministre de l’Intérieur, le garde des Sceaux et le ministre délégué aux Outre-Mer, de reconsidérer cette mesure qui pourrait gravement porter préjudice à notre territoire et à notre jeunesse.

 

Dans l’immédiat, nous demandons de :

1.     Mettre fin sans délai à l’expérimentation dont l’échéance avait été programmée pour ce mois de septembre 2022

2.     Doter la Guyane d’effectifs adaptés en magistrats, greffiers, officiers de police judiciaire, gendarmes et douaniers car la priorité est de partir en guerre contre les réseaux sur l’ensemble du territoire

3.     Doter l’aéroport d’un dispositif radiographique avec le personnel médical nécessaire afin de repérer la drogue ingérée par les passagers en infraction et aménager une unité médico-judiciaire afin de faciliter le travail de la PAF

 

Lors des prochaines Assises de la Sécurité, fixées au 30 septembre 2022 en présence du ministre de l’Intérieur et des autorités judiciaires, la politique préventive et la réponse pénale seront au cœur de nos préoccupations.

 

Pour autant, la politique pénale et répressive ne saurait être l’unique réponse au fléau qui frappe actuellement la Guyane. »

 

Gabriel Serville, président de la Collectivité Territoriale de Guyane

2022.09.15.Lutte contre le trafic de stupéfiants_CP_vf